Le Mari Confesseur


Conte de Jean de La Fontaine

Le Mari Confesseur par Charles Eisen

Illustration de Charles Eisen (1762)



Messire Artus, sous le grand Roi François,
Alla servir aux guerres d'Italie ;
Tant qu'il se vit, après maints beaux exploits,
Fait Chevalier en grande cérémonie.
Son Général lui chaussa l'éperon :
Dont il croyait que le plus haut Baron
Ne lui doit plus contester le passage.
Si s'en revient tout fier en son Village,
On ne surprit sa femme en oraison.
Seule il l'avait laissée à la maison ;
Il la retrouve en bonne compagnie,
Dansant, sautant, menant joyeuse vie,
Et des Muguets avec elle à foison.

Messire Artus ne prit goût à l'affaire ;
Et ruminant sur ce qu'il devait faire :

Pour ce s'avise, un jour de Confrérie,
De se vêtir en Prêtre, et confesser.
Sa femme vient à ses pieds se placer.
De prime abord sont par la bonne Dame
Expédiés tous les péchés menus ;
Puis à leur tour les gros étant venus,
Force lui fut qu'elle changeât de gamme.

Si le Mari ne se fut fait connaître,
Elle en allait enfiler beaucoup plus ;
Courte n'était, pour sûr, la kyrielle.
Son mari donc l'interrompt là-dessus,
Dont bien lui prit.

dit la fausse femelle,
Qui d'un tel pas se sut bien démêler.

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